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2011-02-20

Portrait pas chinois: Serge Gainsbourg, 20 ans d'immortalité



Serge Gainsbourg par William Klein pour la pochette de "Love On The Beat".




NB: Les Portraits pas chinois expriment une vision subjective des artistes ou personnages dépeints. Ils n'ont aucune valeur biographique, ils sont l'interprétation personnelle de ceux-ci, à la manière d'un dessin griffonné  sur le papier.


Paris, le 20 février 2011 à 5H38', lors d'une insomnie, tandis qu'un couple fait l'amour au dessus de ma tête.

On a déjà tout dit , tout vu, tout entendu et tout écrit sur Serge Gainsbourg. Je serais même tenté de m'arrêter là, tant ce que je viens d'écrire est vrai. Tenté de vous renvoyer aux ouvrages de mon excellent et compatriote Gilles Verlant. Point barre...

Sauf que.
Sauf que si il y a bien une chose que Serge m'a donné le goût de faire, avec d'autres illustres connus comme Baudelaire ou Vian, c'est de jouer avec les mots.
C'est de jouer sur les mots.
C'est de jouir des mots.

Et qu'ainsi couchés sur un cahier, le verbe devienne une nourriture terrestre comme une autre.
Qu' écrire assouvisse la soif du début ou l'angoisse de la faim, comme le feraient "manger", "boire", ou "faire l'amour".
Aux grands mots donc, les petits papiers.

Gainsbourg avait su faire de ce sport "origamique" une discipline orgasmique.
De manière singulière , et en y ajoutant, comme un S de sa main sur la partition, le pluriel des notes.

Avec l'oreille du musicien, il faisait bander les jambages des consonnes et gémir la cambrure des voyelles.
Oui.
Parfois cru comme un oui.
Parfois cuit aux vapeurs d'alcool.
Trempé dans du sang d'encre.
Mariné comme un pull.
Fait main et tripoté doigts.
Saillant comme un nez.
Ciselé comme une frange.
Vicieux comme une métaphore.
Attiré comme un amant.
Lové comme une chatte.
Noyé dans le chagrin comme Ophélie.


Les tristes sires et les abeilles polaires à la prude robe ne retiendront de lui que la première ligne de lettres chez l'ophtalmologue, seules visibles à l'oeil resté habillé.
Car on ne lit pas entre les lignes sans entrer dans un lit.
Il n'y a pas de plaisir sans sudation.

Comme les poètes (le mot est lâché) dont il honorait l'autel, Gainsbourg plaçait sans doute le beau au dessus du bien et du mal.
Ce triangle de perdition, comme le miroir d'Alice où, hélas, il aimait nous faire vaciller, dérangeait parfois les moutons somnolents qu'on compte par milliers.
Mais justement, loin du mépris affiché par les vrais cyniques qui brûlent notre argent comme on flambe du pétrole, il réveillait nos consciences au bois dormant.
Car le scandale, le vrai, serait de ne pas reconnaître que dans le souffre , il y avait la souffrance.
Dans la gêne, le génie.

Baudelaire écrit à la fin de "L'Albatros", dans "Les Fleurs du Mal":

Le Poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l'archer;
Exilé sur le sol, au milieu des huées,
Ses ailes de géant l'empêchent de marcher.

Certains objecteurs d'inconscience me diront:
C'est bien joli tout ça, mais c'est que des mots.
C'est comme pisser dans un violon, c'est inutile.

Je pourrais leur répondre comme Rostand dans Cyrano de Bergerac:

Que dites vous? C'est inutile?
Mais on ne se bat pas dans l'espoir du succès!
Non! non, c'est bien plus beau lorsque c'est inutile!

Sauf, que moi, la poésie, sous toutes ses formes, ça m'aide.
Ecrire des poèmes, pisser violent dans un violon (IAM) me permet à la fois de mettre les choses à plat et de leur donner un sens plus vertical.
Pour info: Le couple s'est endormi.

Lucien Ginzburg est mort le 2 mars1991.
Laissant ses amours orphelines, ses enfants à la tête de choux et de roses.

Mais comme Cyrano, une heure avant dîner,
Laissa dans un dernier panache de fumée,
"A la fin de l'envoi..." s'échapper de sa bouche,
Il y a une chose, une seule, qui fait mouche,
Et que Gainsbarre nous souffle à travers ses naseaux
Non, pas une gitane. Des mots. Des mots. Des Mots.

Post scriptum: On ne finit pas d'écrire sur le poète sans le citer.
Voici donc, sur sa Remington portative, quelques vers parmi
mes préférés signés il y a quarante ans (mon âge) par l'immortel Gainsbourg pour La Valse de Melody.



Le soleil est rare
Et le bonheur aussi
L'amour s'égare
Au long de la vie

Le soleil est rare
Et le bonheur aussi
Mais tout bouge
Au bras de Melody

Les murs d'enceinte
Du labyrinthe
S'entrouvrent sur
L'Infini...


           

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